FÉDERATIONS
Aquarama 108 – juin 2025
La vision de… Jacques Massart (BIETC)
« L’Afrique mérite la même qualité de l’eau qu’en Europe »
Quand on pense à l’eau en Afrique, on imagine probablement des femmes allant remplir des bidons à la fontaine la plus proche pour les ramener au village sur leur tête. Cette vision est complètement dépassée, surtout dans les zones urbaines, en partie grâce à l’action de BIETC (Belgian Industrial & Environmental Technologies Company). Cette entreprise conçoit des stations d’épuration des eaux dans le cadre de projets EPC pour des clients publics, et bientôt aussi industriels, sur le continent africain. Elle est dirigée par Jacques Massart, qui possède une longue expérience de la gestion de l’eau en Afrique.
ASPAC International est une entreprise belge EPC (Engineering – Procurement – Construction) qui réalise des projets hydrauliques et environnementaux en Afrique. Elle fournit des solutions pour l’eau potable, les eaux usées et les fuites d’eau, y compris des technologies innovantes comme l’électrolyse et la télésurveillance. Sa filiale ASPAC Technics est la branche exécutive qui prend en charge la construction physique des installations pour l’eau potable et les eaux usées, tandis que sa filiale ASPAC Engineering, créée il y a deux ans, se concentre sur l’ingénierie. Ces entreprises constituent ensemble un groupe intégré pour la fourniture de solutions durables de traitement de l’eau en Afrique.
Il y a quelques semaines, Jacques Massart, propriétaire de la holding, a décidé de renommer ASPAC Engineering sous l’appellation Belgian Industrial & Environmental Technologies Company (BIETC). « Nous l’avons fait principalement pour éviter toute confusion avec les activités exécutives d’ASPAC Technics », explique-t-il.
Installations simples
BIETC conçoit des solutions pour l’eau potable et les eaux usées pour des compagnies des eaux publiques dans divers pays africains, comme le Kenya, le Cameroun, le Ghana, le Togo, la Côte d’Ivoire et la Gambie. « Nous travaillons en tant qu’entreprise EPC », précise Jacques. « Cela signifie qu’en plus de l’ingénierie, nous fournissons également le financement structuré des projets. Les banques belges avec lesquelles nous travaillons sont par la suite remboursées en plusieurs tranches par les ministères des Finances de ces pays. Une fois l’ingénierie achevée, ASPAC Technics construit et installe les stations de pompage, l’épuration des eaux et les réseaux de distribution. Nous voulons élargir le rayon d’action de BIETC et proposer nos services d’ingénierie également à d’autres entreprises. »
« Les retards de paiement de certains clients sont un des plus grands défis auxquels nous faisons face. Ils perturbent notre flux de trésorerie et ajoutent de l’incertitude dans la planification des projets. »
Jacques Massart connaît le marché de l’eau africain comme sa poche. Avant de se lancer avec ASPAC et BIETC, il a travaillé pour une société suisse en tant que directeur régional pour l’Afrique de l’Ouest (depuis le Nigeria). Il a ensuite travaillé à Abidjan (Côte d’Ivoire) pour le compte d’une société allemande. Cette expérience et les réseaux qu’il a créés dans ces pays lui sont très utiles pour y développer de manière organique les activités de BIETC et d’ASPAC. Il a pu observer de première main la profonde évolution du marché de l’eau dans la région.
« Les autorités et les entreprises industrielles africaines sont également tenues de respecter la législation environnementale. La Banque mondiale et d’autres banques internationales financent la construction d’infrastructures répondant aux normes de qualité les plus élevées possible dans ces pays. Le fait que les solutions d’ASPAC Technics sont fabriquées en Belgique avant d’être exportées en Afrique permet de garantir le niveau de qualité. Nos nombreuses références éprouvées en Afrique inspirent la confiance des investisseurs. »
La prise de conscience de la nécessité de telles infrastructures s’est renforcée avec la publication des ODD des Nations Unies. « Ces Objectifs de développement durable sont un puissant moteur et une énorme motivation pour développer des réseaux d’eau de qualité. La Côte d’Ivoire est actuellement le meilleur élève de la classe, mais d’autres pays se distinguent également. C’est pourquoi BIETC souhaite élargir son marché actuel pour participer à la construction d’infrastructures hydrauliques par exemple au Bénin, mais aussi dans des pays d’Afrique de l’Est, comme la Tanzanie et l’Ouganda. »
Les installations que nous concevons pour ces projets sont aussi simples que possible, et relativement faciles à entretenir. « cela nous permet de former des opérateurs locaux pour qu’ils maintiennent les infrastructures hydrauliques dans le meilleur état possible. Nous organisons ces formations ‘sur le tas’ en collaboration avec SWDE (Société Wallonne des Eaux) et d’autres partenaires européens. »
Eau non facturée
Un des plus grands défis pour les infrastructures hydrauliques en Afrique est l’énorme volume d’eau non facturée (NDLR : eau pompée dans le réseau d’approvisionnement mais jamais fournie ou vendue au client à cause de fuites, de compteurs erronés, d’erreurs administratives ou même de vol).
« C’est pourquoi nous travaillons aujourd’hui à l’intégration de nouvelles technologies », poursuit Jacques. « C’est d’un intérêt vital, car les quantités d’eau non facturée sont réellement phénoménales en Afrique, souvent au-delà de 50% ! Dans un projet pilote à Abidjan, nous avons réussi à détecter les fuites et à réduire ce pourcentage à 35%, notamment en installant différents équipements et accessoires. Nous avons l’intention d’élargir ce projet à grande échelle et de produire une valeur ajoutée dans d’autres endroits. »
En ce qui concerne l’avenir, Jacques Massart voit BIETC évoluer à trois niveaux. « Premièrement, nous voulons poursuivre notre partenariat avec Aspac Technics dans le cadre de contrats EPC. Ensuite, à côté des projets publics, nous voulons également livrer des réalisations haut de gamme à l’industrie locale. Troisièmement, nous voulons proposer nos services d’ingénierie également à d’autres maîtres d’œuvre. Cette diversification permettra d’accroître notre potentiel de croissance. Notre équipe compte actuellement quelques 20 personnes (réparties dans nos bureaux en Belgique, au Maroc, en Côte d’Ivoire, au Ghana et au Cameroun), mais elle va encore s’agrandir, notamment pour exporter activement nos solutions de lutte contre l’eau non facturée. »
Dans la perspective de cette future expansion, BIETC s’est affiliée à Watercircle. « Cette organisation peut jouer un rôle déterminant pour développer un réseau solide, y compris en Belgique, et trouver des partenaires industriels avec lesquels nous pourrons accroître notre part de marché en Afrique », conclut Jacques Massart.
« La Côte d’Ivoire est actuellement le meilleur élève de la classe, mais d’autres pays se distinguent également. »
« Les quantités d’eau non facturée sont gigantesques en Afrique. »
Par : Bart Vancauwenberghe
Photos : Aspac